Vous voici face au portail central. Admirez le tympan qui le surmonte. Il relate à travers une multitude de statues la Passion du Christ. Au centre, la scène de la crucifixion attire particulièrement l’attention. Observez les personnages qui entourent le Christ : à sa gauche Synagoga, à sa droite Ecclesia. Cette œuvre allégorique présente une différence notable par rapport aux sculptures du portail sud : les yeux de la Synagogue ne sont pas voilés par un tissu mais par un serpent enroulé autour de sa tête. Ce motif se retrouve également sur les cathédrales Notre-Dame de Paris ou Saint-Seurin de Bordeaux.
Dans le bestiaire médiéval, le serpent est associé aux forces maléfiques, depuis Adam et Eve. Le lien est donc très clairement établi entre l’obstination des juifs dans leur foi et l’action du diable. Réalisée en 1285, soit 50 ans après les statues du portail sud, cette œuvre reflète le durcissement progressif de la position de l’Eglise envers les juifs au cours du XIIIe siècle. A mesure que grandit dans la société médiévale l’accusation faite aux juifs d’avoir tué le Christ, la position de Synagoga s’affaiblit et sa déchéance se mue alors en diabolisation.
Au fil du temps, cette iconographie témoigne de l'antijudaïsme chrétien médiéval. Diaboliser les juifs est un moyen de les maintenir à distance des chrétiens… L'Église s'emploie d'autant plus à avilir l'image des juifs qu'en dehors des périodes de crises, le lien entre chrétiens et juifs n’est pas rompu, ils connaissent une cohabitation relativement apaisée, notamment en raison de leurs relations commerciales et financières.
N’hésitez pas à prolonger votre parcours en pénétrant dans la cathédrale : vous y découvrirez, entre autres trésors, les splendides vitraux médiévaux du bas-côté sud, qui illustrent la vie du Christ et sur lesquels on retrouve de nombreuses représentations des juifs, identifiables à leur chapeau pointu.
photos synagogue au serpent @Fondation de l’Œuvre Notre-Dame